17 Juillet 2022
C’est sous le signe du « tu » de la confidence, de la solennité et de la connivence avec le lecteur que Jean-Pierre Boulic nous invite à partager « la cime des heures », cette pointe extrême du présent que nous devrions toujours goûter dans sa plénitude. Cette attention au monde, cette empathie avec ce qui l’entoure, notre poète ne cesse de s’en réjouir à simplement l’énoncer :
Tu vis à l’orée de l’océan
Les grandes marées déposent sur tes mains
Embruns goémons venus de loin.
Sa musique personnelle est en parfait accord avec son biotope breton (autant dire avec le monde), auquel il ne cesse de se référer et qui trouve des échos en chacun de ceux qui sont attentifs aux rumeurs secrètes des choses. Son océan intérieur creuse ce lieu de l’âme où la constante nouveauté de chaque instant vécu doit nous permettre de goûter à la saveur du monde, du jour saisi dans sa naissance à l’épaisseur de la nuit :
C’est une terre que tu aimes
Révélant ton visage
Peut-être l’âme où se discerne
Une vive parole.
Jean-Pierre Boulic commémore à la façon d’un maître oriental, les moments fugaces qui nous traversent. Avec humilité et ferveur, « tirant de rien choses petites ». Avec aussi l’ascèse signifiante de celui qui est parvenu à faire du temps précieux qui lui est dévolu, une célébration de la vie comme une prière. Il suffit de regarder autour de soi et de broder « Ces mots simples où se rejoignent / Les sourires et meurtrissures / De nos fragiles existences ».
Sa poésie est musicienne, elle bruit du vol des oiseaux, du crissement de l’herbe, de la chanson du vent et si les anges apparaissent parfois, c’est pour célébrer le cantique de l’étincelle, la grâce du frisson, la rumeur persistante du silence, la douleur à son étiage pour parvenir au final à atteindre Celui qu’il pressent, qui vibre en lui et qu’il ne peut nommer autrement que par « le Nom inépuisable »,
Puis dans l’effervescence d’un peut-être
Irriguer du Nom
Jusqu’en cet en bas
Chaque bleu de l’âme
Nul doute que son illustre voisin du pays de Brière eût aimé boire à cette poésie-là.
Jacques Ibanès
À la cime des heures préface de François Cassingena-Trévedy L’enfance des arbres 101 p. 15 €
Inutile de te chercher ailleurs
Tu es ici
Parmi ombres et songes
Tu es ici Potier des mots
Sous la lampe de l’âme
Façonnier du poème
Cœur toujours à l’ouvrage
De grâce en grâce
Et sans fin ruminent tes doigts
À l’instant du matin
Comme celui du soir
Que ce soit au temps des ténèbres
Que ce soit en pleine lumière