Lien entre les amis du poète et écrivain Michel Baglin
1 Mars 2025
Élisabeth Pelloquin publie un premier recueil de poésie au titre généreux : Tout amour est douleur de n’être pas plus grand. Celle qui sait être une formidable animatrice de la Maison de la Poésie de Poitiers (elle en est la co-présidente) et qui était sortie d’une sage timidité en proposant deux très beaux poèmes pour une plaquette éditée en temps de pandémie offre au lecteur toute sa sensibilité de femme poète pour dire la confiance dans la vie et les promesses de la poésie.
Alors, derrière quelques mots forts ‒ ferveur, [être] traversée, relié-e-s, naître multitude, n’être plus que chant ‒ la poète fait battre le sang du poème en s’abandonnant à être une page le temps d’une vie, une page où peut venir s’écrire le chant des oiseaux ; une vie qui serait une jarre remplie de nourritures terrestres et qui voguerait sur un navire entre berceau et tombeau ; un voyage aux deux bouts de l’immensité bleue ‒ la remontée aux sources du fleuve comme pour se sauver de la noyade, et l’acquiescement à l’appel de l’océan empreint d’une douceur mélancolique sois sel et lampe / et mouette légère.
Il y a chez Élisabeth Pelloquin quelque chose du splendide aurige lâchant les chevaux libres sur des chemins inconnus d’elle, ou plutôt de la fière dompteuse attentive à créer des champs merveilleux tant ses poésies modèlent au plus près du réel de puissantes métamorphoses en osmose avec la nature. Celle qui dit Je, affirmée en riche humilité, reste toujours à l’écoute des alentours Un chat blanc veille sur le mur du cimetière et en accueil des atours l’écharpe de ciel gris / piquetée de rouges-gorges, n’hésitant pas à se hausser à hauteur des toits pour garder foi en l’humanité.
L’humanité, c’est l’autre, l’amoureux Il me couvre et me prolonge / le fleuve de ton corps. Ce sont les mères invitées à contenir mon cœur devenu pierre lave et braise. C’est le nous féminin, promesse de faire renaître les hommes. L’humanité, c’est le frissonnement devant l’enfant qui, / à l’aube, / m’a versé dans l’âme / le bleu de ses yeux, des enfants, la présence des jeunes exilés, grappes noires parmi les vignes en grande patience du vin. C’est aller par-delà la solitude vers « le gai savoir des filles » dirait Lydie Dattas, pour que le corps fasse la part belle à l’ombre et à la lumière. Parler… Dire les mots de l’amour. Se laisser traverser. S’ouvrir et s’offrir comme le rêve fou / de roses qui arrêteraient la guerre, lit-on dans le poème dédié à Louise-Michèle, à chacun de mes enfants.
Philippe Pineau
Tout amour est douleur de n’être pas plus grand. ‒ Ex Æquo, 2024. – 48 p. 8 €–