29 Janvier 2022
Pour Alain Noblet, se remémorer ses voyages à pied, c’est partir en pérégrination jusqu’aux rivages de l’intime de soi. Nantis de belles citations de Hugo, José Bergamin, René Huygues et Jean-Jacques Rousseau, le marcheur va cheminer en prose et en poésie le long des sentiers et des routes de France, d’Espagne (son pays de cœur, comme il nous l’a conté dans son précédent ouvrage Ma Garonne), d’Italie, de Hollande, de la Réunion, jusqu’à traverser le miroir à destination des pistes Gwana.
Mais plus que les lieux, ce sont les êtres qui intéressent notre auteur et parmi eux, ceux qui ne cheminent pas pour le plaisir de la balade. Ainsi, les clandestins. « Dans le mot clandestin , il y a le mot destin » Pour ceux-ci, il n’y a qu’une alternative : « la réussite ou la mort ». Qu’ils soient Espagnols du temps de la Retirada, Tsiganes « Du Bosphore à l’Atlantique » ou chanteurs de blues « Entre lacs lagunaires / Bayous et canaux ».
On aura compris que pour Alain Noblet, la marche n’est pas une simple activité de plein air, mais un véritable art de vivre et de philosopher. Dans « Je marche, donc, je suis », il précise ses trente trois façons de déambuler et parmi celles-ci, il célèbre « la marche vers l’Autre », un exercice qui n’est pas que de style, car qui le connaît sait combien il est habité par la fraternité :
« Sans l’Autre je ne suis personne
Mais l’ Autre est mon compagnon
De vie
Avec délectation ou admiration
Je m’approprie et je dérobe
Ses mots et ses valeurs
En reconnaissant visions et croyance
De l’autre
Je vais à la rencontre de moi-même
La conscience de soi naît dans l’altérité
Je suis de la couleur de celui
Qu’on persécute, qu’on stigmatise »
Marcher dans les pas d’Alain Noblet, c’est arpenter bien des paysages dont les plus inoubliables sont au cadastre des territoires de l'âme.
Jacques Ibanès
La Marche à l’écoute de mes voix intérieures
les éditions du jais, 144 p. 13€